Le digital, nouvel élan pour la presse écrite ?
Face à la multiplicité des contenus (versions print et digitale, audiovisuel, podcast, évènements live), les comportements des lecteurs/auditeurs deviennent plus difficiles à comprendre. Alors, ce nouvel écosystème permet-il d’améliorer l’expérience ou la désagrège-t-il sous un flot incessant d’informations ?
Contrairement aux idées aujourd’hui admises, le print a encore de l’avenir ! Selon la dernière étude de l’Alliance pour les Chiffres de la Presse et des Médias (ACPM), publiée en octobre 2021, 96 % de Français lisent chaque mois au moins un titre (quotidien ou magazine), preuve de la place centrale occupée par la presse écrite dans le quotidien des Français. Ces derniers auraient d’ailleurs davantage confiance dans l’information qu’ils lisent dans les journaux et les magazines imprimés (49 %) que dans tout autre média, selon une étude publié le 9 mars 2021 par l’institut international YouGov.
Quelles complémentarités entre print et numérique ?
En 2020, la presse française représentait 9 millions d’exemplaires diffusés et 77 millions de visites enregistrées quotidiennement (web), selon l’ACPM. Si la pandémie de Covid-19 a impacté la diffusion de la presse papier, cette dernière enregistre une hausse dans sa diffusion numérique. Dans ce contexte, les quotidiens nationaux poursuivent leur progression avec 1,4 million d’exemplaires en 2020 (+3,4 % par rapport à 2019), dont 782 000 en version numérique, soit une hausse de +36 % par rapport à 2019, print et digital confondus. Même si le nombre d’exemplaires papier a accusé une baisse en 2020, notamment en raison de la pandémie, les marques médiais fidélisent toujours de nombreux lecteurs grâce à leur diffusion numérique. D’ailleurs, tous les grands quotidiens (Le Figaro, Libération, Le Monde, L’Equipe) démultiplient les modalités d’accès à l’information à travers une multiplicité d’offres et de canaux.
Mais, existe-t-il vraiment un effet de complémentarité entre les différents contenus comme entre les canaux de diffusion ? Si la recherche de nouveaux modèles économiques invite les éditeurs de presse à déployer une variété de contenus et d’accès, avec des bénéfices associés à chaque type de contenus, les principaux résultats des enquêtes démentent ce principe de complémentarité et de synergie. Car, à cette logique de complémentarité, le consommateur peut opposer celle d’empilement, avec une accumulation de contenus et d’accès, sans que les bénéfices liées à la complémentarité n’apparaissent vraiment. Cet effet “millefeuille” conduirait vers une surcharge d’activités et d’informations destructives de valeur.
Des bénéfices de lecture ?
Il semblerait que ces complémentarités entre offres print et digitales ne soient pas si évidentes, alors qu’elles sont régulièrement valorisées, par rapport aux bénéfices spécifiques apportés par chacune des offres. Les études démontrent que les lecteurs “mixtes”, qui consomment à la fois print et numérique, ne privilégient pas davantage le papier que les “exclusifs”, qui consomment soit l’une soit l’autre. En outre, les “mixtes” estiment que la multiplication des supports d’accès a renforcé l’attractivité de l’offre digitale, en réduisant l’attrait de l’offre print.
De nouvelles stratégies
Ces données invitent donc les éditeurs de presse à repenser leur stratégie, en privilégiant l’expérience du lecteur plutôt que la démultiplication des contenus et des accès. Il devient incontournable de valoriser les offres print sur leurs zones d’excellence (mise en avant de grandes signatures journalistiques, haute qualité formelle, confort de lecture, importance sensorielle associée au support de lecture), notamment pour les lecteurs qui n’achètent les publications qu’au format papier. Nul doute que des solutions peuvent être mises en place pour que cohabitent print et digital, sans que l’un ne phagocyte l’autre. Encore faut-il que les attentes du lecteur restent au centre des préoccupations.